Cette dernière semaine, on a pu lire et entendre de nombreux commentaires sur la nouvelle lubie de l’Icann, qui serait de sacrifier le whois, cette base de données consultable par tous qui permet de connaître le titulaire d’un nom de domaine, pour le remplacer par un outil opaque et payant.
Ce raccourci prouve deux choses. Le sujet est sensible (et il l’est car il occupe l’agenda des réunions Icann depuis 10 ans – comment réformer le whois ? ) et les commentateurs n’ont peut être pas lu en profondeur le rapport (épais) du groupe de Travail.
Le Whois c’est quoi ?
Tout d’abord, il y a 30 ans ou plus, vu le peu de noms de domaines, le whois était un tableur, ou un fichier texte qui listait les noms existants.
Ensuite, avec la croissance de l’internet, il est devenu une base de données, qui permettait de contacter une technicien en cas de problème avec un nom de domaine.
Cette intention louable, est toujours louable. Et personne ne la remet en cause, mais si on regarde ce qu’est devenu internet aujourd’hui, on peut s’interroger :
– pourquoi tant de spam ? qui peut collecter ces bases d’adresses ?
– quid de la protection de la liberté de pensée pour les bloggeurs engagés dans des pays peu libéraux ?
– pourquoi une personne ayant son numéro de téléphone sur liste rouge en France devrait elle l’indiquer sur une base publique et mondiale ?
Une fiabilité en baisse
Ces premières questions intriguent, et quand on les complète par l’observation de la réalité, on commence à sentir un besoin de réforme immédiat :
– les formats des données sont tous différents suivant les registrars, rendant la consultation parfois difficile (com et net)
– les données étant publiques certaines personnes indiquent des détails fantaisistes
– comment gérer toutes ces données en prenant en compte les alphabets différents ? Idéogrammes et Latin se télescopent.
Après 10 ans voire plus d’effort, il fallait trouver une solution…
Tout reprendre à Zéro
Bien souvent, la décision est dure à prendre mais elle porte ses fruits … tout reprendre de 0, réinventer l’outil en tenant compte de l’évolution d’internet, sans tabous.
Le groupe de travail, composé d’avocats, de sociétés, de registres et de registrars a donné des pistes.
Un annuaire à plusieurs niveaux qui permettrait de filtrer l’accès en fonction des besoins des utilisateurs.? Un peu comme votre profil Facebook, que vous êtes heureux de pouvoir rendre privé en partie, tout en laissant des infos à ceux que vous jugez dignes de confiance, le nouveau système sera basé sur des habilitations, des autorisations. Et peut être que les spammeurs auront plus de mal à trouver des adresses mails ? Les services de prête-nom seront vérifiés, accrédités et plus fiables ? Mon téléphone ne sonnera plus ne plein milieu de la nuit parce qu’un chenapan l’a trouvé sur internet ? Les ayants droits auront un système standard plus facile à utiliser ?
Finalement, vu comme cela, l’idée est bonne. Non ?
Vive l’Aggregated Registration Data Service (ARDS)
Laissons donc une chance à ce groupe de travail, et mieux aidons le. Les commentaires publics sont ouverts.
Mais de grâce, soyons constructif. Il est rare de pouvoir reprendre de 0 un outil dépassé et de pouvoir apporter son grain de sel.
A voir : https://www.icann.org/en/news/announcements/announcement-3-24jun13-en.htm
————–
Frédéric Guillemaut est le directeur général du Mailclub.
Associé de la société, représentant des bureaux d’enregistrement au Conseil d’administration de l’Afnic, gestionnaire de projet, participant actif au sein de l’Icann, il est le garant du bon fonctionnement de Mailclub.
Il a notamment participé à un groupe de travail sur les transitions de Whois à l’Icann.
Ancien d’Euromed et de l’ESSCA, il a aussi appris, à travers Daydream, sa première société que le chemin de l’entreprenariat n’est pas un fleuve tranquille.
Sa ligne de conduite : il faut être soit à fond, soit à fond.