L’enchère entre les huit candidats à la gestion de l’extension .WEB devrait avoir lieu ce mercredi 27 juillet 2016. Cette nuit, un juge californien a rejeté la demande de suspension de l’enchère par procédure de référé de RUBY GLEN, LLC -filiale de Donuts- contre l’ICANN.
Il est reproché à l’ICANN de ne pas avoir retardé ces enchères malgré des soupçons sur un changement de direction d’un des postulants, la société Nu Dot Co, dont le leadership aurait récemment basculé sous la houlette d’un autre acteur de l’univers des noms de domaine : Verisign (société gestionnaire du .COM).
Donuts et Radix soupçonnent ce changement suite à un mail adressé le 7 juin, de Jose Ignacio Rasco, CEO de Nu Dot Co indiquant qu’un des directeurs ne travaillait plus sur le TLD et que le comité d’administration était désormais composé de lui, un autre directeur et de… « Plusieurs autres personnes » (sic)
En effet, la procédure de candidature prévoit que « si les informations préalablement fournies par un candidat deviennent fausses ou inexactes, alors le candidat doit notifier promptement l’ICANN […] cela inclus des données spécifiques aux candidats telles que des changements de situation financière, de propriétaire ou de contrôle ».
Or, il semble évident que si un acteur majeur de l’industrie du nom de domaine se cachait derrière la société Nu Dot Co, les candidats devraient aborder les enchères de manière bien différente…
Mais l’ICANN, par le biais du « Board Governance Committe » (BGG) a rejeté le 21 juillet 2016 la procédure d’appel de Donuts et Radix visant à suspende les enchères. Elle arguait que l’interprétation du mail était une pure spéculation. L’ICANN aurait conduit des investigations suffisantes pour s’assurer qu’il n’y avait pas eu d’événement chez No Dot Co susceptible d’entrainer un changement dans sa candidature.
Non-content de voir cette demande rejetée, Donuts a porté plainte le lendemain devant un tribunal californien. Ses griefs concernaient une négligence de l’ICANN et pis, un manquement contractuel à son obligation de bonne foi. Cette excitation de Donuts par rapport à Nu Dot Co et l’ICANN peut s’expliquer par le mécanisme d’enchère en place et ses conséquences financières….
En effet, s’il y a plusieurs candidatures pour une extension, comme c’est le cas pour le .WEB, l’ICANN a prévu un mécanisme d’enchères. Si tous les candidats sont d’accord, ils peuvent confier l’organisation de ces enchères à une société privée. En cas de désaccord d’au moins un des candidats, alors les enchères sont conduites sous la houlette de l’ICANN via une procédure dite de « last resort ».
Dans le premier cas, une somme équivalente à celle versée par l’acquéreur est répartie équitablement entre les autres candidats à titre compensatoire. Pour une extension comme le .WEB dont le prix devrait atteindre plusieurs millions, cette somme n’est pas négligeable…
Dans le second cas, cette somme revient intégralement à l’ICANN et les candidats déçus ne bénéficient d’aucune compensation.
Or, dans le cas du .WEB, un seul candidat s’était opposé à la tenue d’une enchère privée… Nu Dot Co.
Aussi, l’ICANN est accusée par certains détracteurs d’être au cœur d’un véritable conflit d’intérêt. Dans sa plainte, Donuts soulignait le fait que l’ICANN n’avait aucun intérêt financier à chercher à exclure Nu Dot Co de l’enchère, au risque de perdre le bénéfice conféré par la procédure de « last resort ».
Quoi qu’il en soit, Donuts n’a pas réussi à convaincre les instances de l’ICANN ni même le tribunal Californien du bien-fondé de sa requête.
Une chose reste certaine : si le résultat de l’enchère, dévoilé la semaine prochaine, ne donne pas Donuts vainqueur, il aura perdu beaucoup d’argent dans la bataille. Pire, si elle bénéficie à Nu Dot Co et que cette société s’avère finalement être un écran d’un autre acteur de l’industrie, alors on peut tabler sur une hystérie collective.
En tout état de cause, on peut gager que le prochain sommet ICANN sera mouvementé….