Cette fois-ci, c’est à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) que les squatteurs de noms de domaine s’en sont pris… visant des entreprises et des marques dont la renommée ne fait pas de doute, les squatteurs n’ont désormais plus peur de rien !
Qu’est-ce qu’une enveloppe Soleau ?
Par un arrêt inédit au bulletin n°10/22702, la Cour d’appel de Paris a, le 22 mai 2013, rendu à l’INPI ce qu’il lui appartenait. En effet, « l’enveloppe Soleau est un produit de l’INPI qui, sans être un titre de propriété industrielle, (…) permet de dater de façon certaine la création (d’une) œuvre et (de s’) identifier comme auteur ».
Ainsi, seule l’INPI disposerait a priori de droits et d’un intérêt légitime sur l’utilisation et l’exploitation de la combinaison des termes « enveloppes » et « Soleau ». C’est en tout cas ce que nous apprend cet arrêt en date du 22 mai 2013.
En l’espèce, l’INPI a constaté l’enregistrement et l’exploitation d’une marque « e-soleau », numéro 3323121 et des noms de domaine litigieux suivants : « e-soleau.fr », « e-soleau.net », « e-soleau.com », « e-soleau.eu », « enveloppe-soleau-electronique.com », « enveloppe-soleau-electronique.net » et « enveloppe-soleau-electronique.fr », par la Société SARL IDEES & PATENTES et Monsieur Guillaume BEHUE.
Pourquoi agir sur le terrain judiciaire ?
Rappelons à ce titre que le souhait de l’INPI d’agir sur le terrain judiciaire, à l’exclusion d’une procédure alternative de résolution des litiges, a probablement été dû à l’enregistrement de la marque litigieuse « e-soleau ».
En effet, l’existence d’une marque confère à son titulaire des droits et un intérêt légitime sur les noms de domaine reprenant sa marque, quand bien même celle-ci serait non valable ou déchue. L’invalidité d’une marque ne peut en aucun cas être plaidée devant un centre de résolution des litiges.
Demande tendant à la nullité de la marque et au transfert des noms de domaine litigieux
Dans ce cadre, l’INPI a saisi le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris afin d’obtenir la nullité de la marque litigieuse ainsi que le transfert des noms de domaine litigieux à son profit.
Par jugement du 02 mars 2010, le Tribunal a fait droit aux demandes de l’INPI, par une décision revêtue de l’exécution provisoire, en déclarant la marque « e-soleau » n°3323121 nulle et en imposant le transfert des noms de domaine « e-soleau.fr », « e-soleau.net », « e-soleau.com », « e-soleau.eu », « enveloppe-soleau-electronique.com », « enveloppe-soleau-electronique.net » et « enveloppe-soleau-electronique.fr » au profit de l’INPI, et ce sous astreinte.
Que se passe-t-il en cas de non-exécution de la décision de transfert ?
Constatant la non-exécution de la décision, l’INPI a de nouveau saisi le Tribunal afin de demander la liquidation des astreintes. Faisant de nouveau droit à sa demande, le juge a condamné in solidum les défendeurs à verser à l’INPI pas la somme de 54.000 euros au titre des jours des retard dans l’exécution de la décision.
Ainsi, en cas de non-exécution d’une décision de transfert revêtue de l’exécution provisoire et prononcée sous astreinte, le « perdant » devra postérieurement être condamné au versement de dommages et intérêts. Cette condamnation s’appelle « liquidation d’astreintes ».
C’est ainsi que la Société SARL IDEES & PATENTES et Monsieur Guillaume BEHUE ont interjeté appel de cette décision. A tort vous nous direz ? Eh non, bien que confirmant la décision de première instance, la Cour d’appel a toutefois recalculé le montant de la liquidation des astreintes. Ainsi, les défendeurs n’auront plus que 16.200 euros à verser à l’INPI, contre les 54.000 euros initiaux.
Arrêt d’appel
En effet, la Cour d’appel a, dans un premier temps, confirmé la nullité de la marque litigieuse en raison de son caractère frauduleux. Elle dénonce à ce titre l’intention des défendeurs tendant à priver l’INPI de l’usage d’un terme nécessaire au développement de son activité et de nuire à ses intérêts.
Dans un second temps, la Cour procède au rejet des demandes diverses des appelantes et constate par la suite que, bien que les transferts n’aient pas été opérés à temps, les défendeurs n’ont pas procédé au renouvellement des noms de domaine litigieux. Cette situation « démontre leur intention de ne plus les protéger à leur profit, d’autant plus qu’il n’est pas sérieusement dénué qu’aucun de ces noms de domaine n’a été exploité ensuite du jugement du 02 mars 2010 ».
Dans ce cadre, la Cour a confirmé la décision en toutes ses dispositions, « sauf en ce qu’elle a fixé à 54.000 euros le montant de liquidation des astreintes fixées par le jugement du 02 mars 2010 » et a, par conséquent, condamné les appelants à payer à l’intimé la somme de 16.200 euros au titre de la liquidation des astreintes.
L’arrêt n’est pas innovant mais a le mérite de rappeler que la réservation de noms de domaine dans le but d’empêcher le développement des activités d’une entreprise est punie par les juges ; et qu’en cas de non-exécution d’une décision rendue sous astreinte et revêtue de l’exécution provisoire, une liquidation d’astreintes peut être opérée.
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Article écrit par Myriam Gribelin
Myriam est juriste au sein du département juridique du Mailclub. Titulaire d’un Master 1 Droit Économique et des Affaires ainsi que d’un Master 2 Droit de la Propriété Intellectuelle et des Nouvelles Technologies, elle maîtrise les problématiques liées aux marques et aux noms de domaine. Elle est joignable par mail à legal@mailclub.fr pour tout renseignement sur les services proposés par son département.
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